Un véritable remake d’un jeu de plus de 10 ans peut-il dépasser allègrement l’original au point de ne plus du tout être le même jeu ? C’est en ayant cette question en tête que j’ai lancé Yakuza Kiwami 2. Le premier opus, sorti l’année dernière, m’avait déjà épaté par sa réalisation et sa relecture d’un titre qui m’avait marqué à sa sortie sur PlayStation 2. Deux générations de consoles et un moteur 3D maison (le Dragon Engine) plus tard, Sega nous prouve qu’avec du travail et des idées on peut développer un jeu exceptionnel. Yakuza Kiwami 2, GOTY 2018 ? Probablement. Explications.
Yakuza Kiwami 2 : Kiryu renait de ses cendres
Une beauté démentielle
Je vais vous le dire franchement, parler d’un jeu comme Yakuza Kiwami 2 nécessite beaucoup de rigueur tant il y a à dire dessus. A une époque où les éditeurs font des « portages HD » plus ou moins judicieux et avec parfois une bonne dose de fainéantise, Sega débarque avec son costard à un million de yens et défonce toute la concurrence avec un véritable remake de Yakuza 2 initialement sorti sur la défunte PlayStation 2. Et je ne parle pas d’un simple filtre HD tant le jeu d’aujourd’hui n’a absolument plus rien à voir avec son ancêtre. Déjà bien sûr, parlons de sa beauté. Je peux vous le dire, j’ai été subjugué par l’aspect graphique du jeu. Évidemment le Dragon Engine (le moteur maison de Sega pour la série Yakuza et développé pour le sixième opus) fait des merveilles et je pense sincèrement que c’est le jeu le plus beau qu’il m’a été donné de voir jusqu’ici. Le niveau de détails dans les décors de Karumocho et Sotenrobi (néons, flaques d’eau, effets de lumière…) est tout bonnement impressionnant. On s’y croirait. Et ne parlons pas des visages. Car si certains personnages secondaires sont peut être en retrait, impossible de ne pas halluciner devant le réalisme des visages des personnages principaux. Les cinématiques sont ahurissantes et on peut deviner ce que ressentent les personnages sans effort tant les expressions faciales sont travaillées. On peut même distinguer la sueur sur la peau c’est dire ! Je pourrai parler des heures des graphismes de Yakuza Kiwami 2 tant j’ai été impressionné. Et pourtant j’ai tout de même joué au dernier God of War et à d’autres titres de cette génération de consoles qui m’ont laissé coi (comme Horizon par exemple) mais aucun ne m’a autant scotché. Il est probable que le réalisme des quartiers visités dans le jeu joue beaucoup sur l’immersion par rapport à un monde Nordique dévasté mais tout de même, Sega a réussi un incroyable tour de force.
Un scénario digne d’un film
Mais on n’achète pas un jeu vidéo parce qu’il est beau, mais parce qu’il propose une expérience de jeu intéressante. Et de ce côté-là aussi croyez-moi je ne suis pas déçu. Le scénario de Yakuza Kiwami 2 est vraiment captivant. On incarne de nouveau le Dragon de Dojima, aka Kazuma Kiryu qui est je dois bien l’admettre, mon héros de jeu vidéo favori. Il a une classe et un charisme incroyables. Notre héros donc, un an après les évènements de Yakuza Kiwami, s’est éloigné du clan Tojo et a laissé sa position de chef à Terada, un ami et allié. Alors qu’il vient se recueillir sur la tombe d’amis chers tombés au combat, Kiryu croise Terada qui se fait alors tirer dessus par des ennemis et donne une lettre à Kiryu avant de passer l’arme à gauche. En tant que quatrième chef du clan Tojo, Kiryu se rend donc au QG du clan Tojo avec la ferme intention de découvrir qui l’a tué et pourquoi. Mais comme il s’est retiré des affaires, il n’a pas l’intention de redevenir le chef et propose donc aux membres du clan de retrouver Daigo, qui doit être le vrai successeur de Terada. Mais il doit également se rendre dans le Kansai, dans le quartier de Sotenrobi, afin de conclure une alliance avec le clan Omi, des ennemis du clan Tojo depuis toujours. Mais les négociations ne se passent pas exactement comme prévues et le Dragon de Dojima va rapidement trouver sur sa route à la fois Ryuji Goda, surnommé le Dragon du Kansai mais aussi une jeune policière, Kaoru Sayama, qui va le suivre pour retrouver les meurtriers de ses parents.
Les nombreux personnages, leurs caractères tous travaillés dans les moindres détails et le réalisme des scènes de dialogue rendent le tout tellement crédible qu’on croirait être devant un véritable film de yakuzas. Alors certes, si vous n’êtes pas du tout familier avec cet univers (hiérarchie, mode de vie, notion de respect…) vous risquez d’être un peu perdu devant la profusion d’informations et de protagonistes (d’autant que plusieurs débarquent souvent en même temps). Ce qu’il faut retenir c’est qu’un clan de yakuzas porte un nom (ici Omi ou Tojo) et est composé de plusieurs familles de yakuzas qui revendiquent leur appartenance à ce clan. Chaque famille possède également son propre nom (Majima, Kazama…) et les chefs de ces dernières participent aux différentes réunions que peut organiser le chef du clan. Ils sont donc sous ses ordres à lui, un peu comme un parrain de la mafia si vous voulez.
Shenmue-like ?
On compare souvent la série des Yakuza à GTA mais je dois dire que pour moi cela n’a pas de sens. Alors certes, l’ambiance « gangster » est similaire mais pour moi la ressemblance s’arrête là. Là où un GTA propose une aventure en monde ouvert avec véhicules et une ambiance assez légère, Yakuza Kiwami 2 offre lui une aventure beaucoup plus intimiste. Dans ce titre, l’aventure se passe entre deux quartiers : Kamurocho (dans le Kanto) et Sotenbori (dans le Kansai). S’ils ne sont pas immenses comparés à une ville comme Los Santos, ils ont le mérite d’être beaucoup plus détaillés et vivants. Le nombre de PNJ à l’écran est assez impressionnant et on se balade avec plaisir dans ces lieux colorés par la lumière des milliers de néons qui ornent les boutiques et autres restaurants. Et ici la plupart des lieux ne sont pas uniquement là pour la figuration, il y a ainsi de nombreux endroits où vous pourrez dépenser votre argent soit pour vous nourrir (il y a une jauge de « faim » symbolisée par un estomac qu’il vous faudra remplir régulièrement en mangeant) soit pour acheter des objets voir même pour vous amuser ! Parce que dans la pure tradition des jeux Sega comme Shenmue par exemple, il existe des salles d’arcade dans lesquelles vous pourrez jouer à Virtua Fighter 2 ou encore Virtual On dans leurs versions d’origine. J’ai mentionné le titre de Yu Suzuki et il vous faut bien comprendre que si Shenmue n’avait jamais vu le jour, il est peu probable que Yakuza aurait pu sortir. De nombreuses mécaniques de jeu ont ainsi été reprises comme le système de combat (moins poussé et plus arcade malgré tout) ou la possibilité d’acheter tout un tas d’objets dans des magasins.
Bats-toi comme un Yak’ !
Comme dans son modèle, Yakuza Kiwami 2 fera la part belle aux combats. Se balader dans Kamurocho ou Sotenbori peut être dangereux et de nombreux « voyous » et autres yakuzas de bas étage voudront chercher des noises à notre héros. Ces combats sont généralement funs car outre la puissance de Kiryu il existe toujours des actions contextuelles vraiment jouissives comme exploser la tête de l’adversaire contre un mur par exemple. Les combats sont assez rapides, agréables et on prend plaisir à ratatiner ces malfrats qui osent se mettre sur notre chemin. D’autant plus qu’on peut utiliser des armes (pistolets, barre de fer, batte de baseball…) mais également faire preuve d’un esprit pratique en se servant de ce qui traine au sol (cône de signalisation, vélo, pancarte…) pour leur en mettre plein la tête. Certaines armes peuvent être stockées dans l’inventaire (ou dans une boite si vous commencez à en cumuler pas mal) et ainsi être utilisées quand bon vous semble. A savoir que chaque arme possède un certain nombre d’utilisation et que passé ce dernier elle se brise. Mais si Kiryu est puissant, vous pouvez aussi le renforcer en l’équipant de différents objets (gilet pare-balle, ceinture de karaté, pierre de résurrection…) que vous pourrez trouver ou acheter à de nombreuses occasions.
Mais l’équipement ne fait pas tout et Yakuza Kiwami 2 propose un petit côté RPG pour améliorer les caractéristiques de Kiryu. A de nombreuses occasions vous gagnerez de l’expérience divisées en plusieurs domaines. Vous pourrez ainsi acheter de nouvelles compétences (je vous recommande d’ailleurs de prioriser celle qui fait apparaitre les missions annexes sur la carte, celles qui rapportent de l’expérience supplémentaire, celle qui fait apparaitre les « ennemis riches » et celles qui font apparaitre plus d’objets par les ennemis vaincus parce que cela vous permettra d’emmagasiner pas mal d’argent et d’expérience rapidement). C’est de cette façon que vous pourrez augmenter les statistiques de Kiryu puisque ses jauges de vie et de « Heat » mais aussi sa force et sa défense vous coûteront de très nombreux points d’expérience. L’avantage d’un tel système c’est que c’est le joueur qui décide de l’orientation de son personnage et de son évolution. On peut tout à fait se concentrer sur ses capacités physiques ou au contraire souhaiter apprendre toutes les techniques de combat. Chaque joueur y trouvera son compte tant les possibilités sont nombreuses.
Des quêtes annexes comme s’il en pleuvait
Dire que Yakuza Kiwami 2 propose beaucoup de quêtes annexes serait un euphémisme tant le contenu du jeu est monstrueux. On peut très bien ne faire le titre qu’en ligne droite sans se préoccuper de ce qui se passe autour mais par rapport à sa version d’origine, ce Yakuza Kiwami 2 est encore plus généreux. En effet, outre les sempiternelles quêtes où il faut aider différents PNJ dans leurs déboires (défendre quelqu’un qui se fait attaquer, retrouver un objet perdu…) vous aurez de quoi faire pour passer le temps. J’ai parlé plus tôt de la salle d’arcade mais ce n’est pas tout. Vous pourrez ainsi chercher les nombreuses clés de casier recelant des objets, jouer au Gô, aux cartes ou encore au mah-jong mais au delà de ces « mini-jeux », deux activités risquent de vous prendre tout votre temps libre : la gestion d’un cabaret et la construction de votre clan. Héritées d’anciens opus, ces deux activités (disponibles après avoir atteint un certain point dans l’histoire) sont très chronophages et travaillées. Pour le cabaret par exemple, vous allez devoir faire d’un endroit au bord de la faillite la coqueluche des hommes du coin ! Pour cela il vous faudra recruter de nouvelles hôtesses et les faire augmenter de niveau en servant des clients. Pour augmenter leurs statistiques, rien de mieux que des nouveaux vêtements et accessoires. N’oubliez pas non plus de lier des contrats avec les commerçants du coin pour gagner de la clientèle. Ainsi, chaque session de ce « mini-jeu » dure trois minutes durant lesquelles vous allez attribuer à des clients l’hôtesse qui leur convient le mieux pour pouvoir gagner un maximum d’argent. Le but ultime étant de renverser le plus gros cabaret de la ville en réussissant à battre tous les autres en terme de revenus. Addictif et sympa, cette séquence de jeu a le mérite en plus de faire gagner pas mal d’argent à Kiryu.
Pour ce qui est de votre clan, il s’agit principalement de sessions de combats stratégiques dans lesquelles vous dirigez des unités composées de gens que vous avez préalablement recrutés pour protéger les matériaux dont Majima a besoin pour construire Kamurocho Hills. Bien entendu, si les joutes sont de plus en plus complexes, la possibilité de faire augmenter les caractéristiques de vos troupes vous aidera grandement ! Évidemment, le côté RTS est vraiment simplifié au maximum et on est beaucoup plus proche d’un Tower Defense ou d’un mini-jeu de Ni no Kuni II que d’un God Wars ! Du coup, même les non-initiés pourront prendre plaisir avec ces phases de jeu et c’est là une des nombreuses forces du titre. Et si jamais ces deux activités ne vous suffisent pas, vous pouvez encore aller faire du golf, regarder des vidéos, faire des photos avec des modèles qui sont de véritables actrices, tenter de remporter les tournois au Colisée ou encore tenter de remplir la « Completion List » en réalisant tous les objectifs du jeu. Les amateurs de trophées en auront également pour leur argent s’ils veulent décrocher le platine tant certains d’entre eux sont difficiles et longs à obtenir. En clair, la durée de vie de Yakuza Kiwami 2 est particulièrement exemplaire puisque si le contenu est gargantuesque, il est surtout varié et plaira à tous les types de joueur. Le scénario principal est lui aussi un modèle du genre puisqu’il vous faudra quand même du temps pour venir à bout de l’histoire. Et si tout cela ne vous suffisait pas, sachez qu’à partir d’un certain chapitre vous débloquerez le scénario de Goro Majima qui explique comment ce dernier en est arrivé à quitter le clan Tojo ! Une chouette idée qui élimine certaines zones d’ombre de l’histoire et rend le tout très cohérent.
Perfect ?
Vous l’aurez compris, le titre de Sega est exceptionnel à bien des titres ! Mais il est maintenant temps de savoir quels sont les véritables défauts du jeu. Spoiler Alert, il en a très peu. L’ambiance sonore est excellente, que ce soit pour les bruits ambiants, les différentes musiques mais surtout pour les voix des personnages qui sont parfaites et entièrement en japonais s’il vous plait. Néanmoins, il faut savoir qu’hormis durant les cinématiques (dignes d’un grand film), les dialogues ne sont pas doublés. Dommageable dans le sens où l’immersion en prend un coup. Surtout que le bruitage de machine à écrire quand les discussions des personnages défilent parait vraiment anachronique, encore plus vu la qualité du reste. Mais le véritable point noir de Yakuza Kiwami 2 c’est bel et bien son absence de traduction française. Si à sa sortie initiale le choix pouvait se comprendre (faire une traduction en Europe coûte beaucoup d’argent car il y a plusieurs langues dominantes) car Sega ne pouvait pas imaginer si le succès serait au rendez-vous, je trouve qu’aujourd’hui ce choix n’est pas judicieux. La base de fans de la saga est vraiment importante en Europe et je pense que Yakuza Kiwami 2 pourrait avoir encore plus de succès qu’il n’en aura s’il avait été traduit. Dans tous les cas même si cela est vraiment triste, passer à côté de ce chef-d’œuvre le serait encore plus. Une dernière chose également que certains joueurs pourraient regretter est le décalage entre le sérieux du scénario et de l’ambiance générale avec les différents mini-jeux et autres à-côtés qui sont parfois vraiment à la limite du WTF. Si pour ma part cela fait partie intégrante de ce qui fait le sel du jeu, je peux concevoir que certaines personnes trouvent à y redire.
Conclusion
Que retenir de Yakuza Kiwami 2 ? Plus qu’un simple portage d’un jeu obscur, il s’agit là du meilleur remake jamais fait d’un jeu qui mérite toute votre attention. Alors certes, les textes totalement en anglais pourront rebuter les anglophobes mais il faut savoir que c’est son unique véritable défaut. Sublime à la fois techniquement et graphiquement, possédant un scénario riche et prenant ainsi qu’une ambiance et une jouabilité frôlant la perfection (même si à de rares moments la caméra en combat fait des siennes), Yakuza Kiwami 2 est tout simplement un hit absolu ni plus ni moins. Mon GOTY 2018 ? A l’heure où j’écris ces lignes c’est un grand oui. Le seul moyen pour que vous n’appréciez pas le jeu à sa juste valeur c’est si l’ambiance globale du titre (les yakuzas) vous laisse hermétique. Dans le cas contraire, si les jeux d’action/aventure avec une vraie histoire sont votre came et que l’anglais ne vous gène pas alors foncez ! Vous ne le regretterez pas. Pour faire simple, Yakuza Kiwami 2 est de ces jeux qui vous feront dire que finalement les remakes c’est quand même une idée de génie. Si vous cherchez la définition de perfection dans le dictionnaire, il y a de grandes chances que vous trouviez une image de Yakuza Kiwami 2 à côté. Un titre qui mérite sa place dans toutes les ludothèques du monde, un point c’est tout.
Graphismes: | |
Gameplay: | |
Bande-son: | |
Durée de vie: | |
Note finale: |
*Ce test a pu être réalisé grâce à une version presse du jeu reçue grâce à la générosité de Koch Media et de la merveilleuse Célia (meilleure attachée presse du monde qu’on se le dise) que je remercie chaleureusement pour leur confiance*
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