10 ans après, Final Fantasy XV est là !
Si rédiger une critique d’un jeu n’est jamais un exercice simple, écrire celle de Final Fantasy XV a été un véritable challenge pour moi. Ce titre, disponible aujourd’hui sur PlayStation 4 et Xbox One, aura mis presque dix ans pour arriver sur nos consoles dans une version coupée, rapiécée et pourtant étrangement charmante. Je n’attendais rien de cette aventure, à vrai dire je ne suis pas un grand amateur de Final Fantasy, et une fois encore Hajime Tabata a réussi a m’émerveiller.
Final Fantasy XV ou la narration éclatée et problèmatique
Final Fantasy XV est un jeu rempli de défauts et de problèmes. Et le plus important d’entre eux, le plus dérangeant est sa narration et la façon qu’il a de raconter son histoire.
Avant même de se lancer dans l’aventure du jeune prince Noctis, Final Fantasy XV vous oblige a regarder Kingsglaive, un film en images de synthèse qui sert tout simplement d’introduction au jeu Final Fantasy XV et à son univers. D’ailleurs je ne comprend absolument pas pourquoi Kingsglaive n’est pas un morceau à part entière et surtout jouable de FFXV, après tout ses événements sont capitaux pour la compréhension du scénario et le film, réalisé par Takeshi Nozue et produit par Hajime Tabata, propose une histoire riche de personnages intéressants, forts et même absolument fantastiques tout en vous en mettant plein les yeux grâce à d’excellentes scènes d’action.
En plus de Kingsglaive il existe aussi un anime, Brotherhood, et une nouvelle traduite directement en français qui vous aideront à à mieux comprendre l’histoire de FF XV avant même de le commencer.
Je ne suis pas un grand fan du principe de la narration éclatée, qui consiste à disperser l’histoire et le scénario d’un jeu à travers différents médium, et Final Fantasy XV m’a vraiment dérangé de ce côté là en cachant des éléments clefs à ses joueurs les moins attentifs ou les moins bien renseignés. C’est d’autant plus dommage que certains des produits issus de cette narration éclatée sont formidables, et là je parle bien évidemment de Kingsglaive.
Mais la narration éclatée n’est pas le seul souci qu’a Final Fantasy XV avec son histoire. A cause d’un développement plus que chaotique, des morceaux du jeu se sont complétement égarés en cours de route ou ont du être sacrifiés pour que le jeu puisse finalement sortir sur PlayStation 4 et Xbox One. Au final, il manque tout simplement des pans de l’histoire.
Pas juste quelques scènes cinématiques ou une dizaines de lignes de textes, non, il manque clairement des morceaux entiers de l’histoire pour tout expliquer. Ravus, le frère aîné de Luna, est un des personnages clef dans l’histoire de FF XV et malgré ce statut, il n’aura le droit qu’à moins de deux minutes à l’écran sans même que ses motivations soient expliquées. Si vous voulez un début de réponse à son comportement, vous devrez lire des documents traînant ici et là.
Ce principe s’applique d’ailleurs à presque tous les personnages du jeu puisque en réalité FF XV se focalise uniquement sur le point de vue du jeune Roi du Lucis, Noctis, et de ses amis. Ce n’est pas forcement une mauvaise idée et je reviendrai sur ce point un peu plus tard dans la critique, cependant cela bloque le joueur dans une configuration où il lui manque des informations pour comprendre de façon globale l’histoire.
Par exemple, la destinée de Noctis et son rôle ne sont abordés que vers la toute fin du jeu dans une conversation avec un Archaean. Et pourtant les informations révélées au fil de cette conversation sont indispensables pour mieux comprendre le comportement de Regis, l’ancien Roi du Lucis et surtout le père de Noctis, mais aussi de Lunafreya ou encore de Ravus.
Les problèmes de narration et d’écriture sont donc nombreux dans Final Fantasy XV, et le simple fait de nous faire évoluer dans un univers où la guerre fait rage depuis des décennies alors que les paysages que Noctis et ses amis admirent sont vierges de tout de champ de bataille aide à comprendre à quel point le développement de ce jeu a du être complexe et douloureux.
Final Fantasy XV : Au royaume des aveugles, les manchots codent des jeux
Je pourrais aussi vous mentionner les soucis de gameplay de Final Fantasy XV, à commencer par la caméra parfois complètement folle du jeu. En fait même si elle se comporte souvent parfaitement, dès que l’action devient trop frénétique ou que vos ennemis sont trop grands, elle s’emballe et vous empêche de voir correctement ce qui se passe à l’écran.
Et c’est particulièrement saisissant quand on affronte l’adamankhelone, une tortue aussi grande qu’une montagne, ou des géants de fer dans des espaces confinés. C’est particulièrement dommage pour un jeu aussi dynamique d’avoir de tels soucis avec sa caméra, au point de rendre parfois l’action illisible.
Cela me rappelle d’ailleurs, avec amusement, ce que me disait Yosuke Tomizawa à propos des Aragami beaucoup trop gros pour son jeu lors de notre interview en Avril dernier.
D’ailleurs en parlant de difficulté à lire ce qui se passe à l’écran, c’est un défaut que j’ai surtout eu pendant les premières heures de jeu où j’avais simplement du mal à comprendre l’action dans les mêlées. Dès qu’on affronte un grand groupe d’ennemis, le combat peut vite devenir confus et particulièrement fouillis, à tel point qu’un retrait tactique ou qu’un matraquage, lui aussi tactique, de la touche deviennent vos seules portes de secours.
Et l’action est parfois très confuse à lire, ce qui est dommage parce que manette en main FF XV est un jeu d’action assez agréable quand tout se déroule correctement et on s’amuse même pas mal avec la téléportation, le pouvoir fantastique du jeune roi.
C’est d’autant plus dommage que le pouvoir de l’éclipse, le fait de lancer son arme puis de se téléporter dessus, est une petite merveille de gameplay. A la fois sensationnel visuellement et riche en émotions lors des combats, c’est un excellent moyen de dynamiser l’action et surtout de s’amuser en jouant au ninja surpuissant ! Et même si Final Fantasy XV vous oblige à prendre le contrôle de Noctis il est aussi possible de donner un ordre précis, en fait il s’agit surtout de déclencher une compétence, à chacun de vos coéquipier, ordre que vous pouvez modifier dans l’écran de personnalisation et qui s’avère très utile dans les combats endiablés du jeu.
Juste un petit mot sur les temps de chargements du jeu, qui sont un très bel hommage aux pires moments que j’ai passé sur la PlayStation première du nom ! Les loadings de FFXV sont trop longs, on parle parfois de plus d’une minute à rester bloquer sur un écran statique, et ce à chaque fois qu’on a la bonne idée de se téléporter près de la voiture ou d’utiliser la conduite accélérée pour arriver à un endroit sans… attendre.
Hajime Tabata’s Final Fantasy XV
Si vous remontez un peu dans l’article, j’ai dit au début avoir été émerveillé par FFXV et pourtant j’ai passé presque deux paragraphes à citer des défauts, parfois graves ou handicapants, du titre sans mâcher mes mots.
En fait quand je disais avoir eu beaucoup de mal à rédiger ma critique de Final Fantasy XV c’est avant tout parce qu’il s’agit d’un jeu dirigé par Hajime Tabata, un homme dont je respecte énormément le travail et que vous connaissez peut être pour avoir dirigé Crisis Core et surtout l’intouchable (à mes yeux) Final Fantasy Type-0.
FFXV est totalement dans la lignée des jeux de Tabata et se présente même comme une suite très spirituelle à Type-0 HD puisqu’il s’agit d’un jeu avec un rapport assez vague à la licence phare de Square Enix mais qui propose une écriture et une science de l’humain qui frôle le génie.
Pour moi Hajime Tabata est un fan absolu de la série Final Fantasy mais ne veut absolument pas reproduire les schémas classiques de la série, il conçoit ses projets comme des aventures à part entière plutôt qu’un simple jeu où l’on coche des cases. En jouant à FFXV je n’ai jamais eu l’impression de jouer à un Final Fantasy mais plus à un titre réalisé par un grand connaisseur de la série, un fan de la grande époque à qui l’on offrait la possibilité de faire une aventure en y jetant des clins d’œils à la licence clef de Square tout en proposant une écriture et une science de l’humain qui frôle le génie.
D’ailleurs je conçois FFXV comme une suite très spirituelle à Type-0 HD et je suis persuadé que mon expérience avec ce jeu m’a bien préparé à ce que j’allais vivre avec Noctis, Ignis, Gladiolus et Prompto.
Quatre garçons dans le vent
FFXV a été pensé, en tout cas quand Hajime Tabata a pu reprendre le projet en main et rebâtir le jeu sur les cendres de FF Versus, comme un roadtrip entre quatre amis où l’évolution des personnages, leurs doutes et leurs rêves seront les thèmes principaux. Et comme Type-0, c’est une sincère réussite. J’ai eu énormément de mal à me faire au groupe de protagoniste de Final Fantasy XV surtout à cause de leur design trop proche de ce que propose en général Tetsuya Nomura, et qui donne un aspect boys band beaucoup trop violent à un groupe de personnages finalement plus qu’attachants.
Au final il m’aura fallu en tout et pour tout trois heures pour tomber sous le charme de Noctis, Ignis, Gladiolus et surtout Prompto. D’ailleurs Prompto était sans aucun doute le personnage qui me rebutait le plus dans le casting de FFXV et j’étais certain de le détester en jouant au jeu. Finalement c’est devenu mon chouchou, un personnage que j’aime énormément et qui m’a fasciné durant toute ma partie. Et si Prompto est aussi réussi c’est parce qu’il amène de la vie dans le groupe, c’est toujours lui qui lance les conversations dans le groupe, toujours lui qui fait les petites blagues innocentes ou qui chantonne pendant qu’on explore le monde. En fait sans Prompto l’aventure du jeune Prince serait plutôt morne et beaucoup trop « sérieuse » dans le ton. Et malgré ce côté drôle et charmant, c’est aussi un personnage rongé par les doutes ou sa vie d’avant, ses vies d’avant même. Hajime Tabata a vraiment un don pour me faire aimer des personnages virtuels !
Mais d’une manière plus générale, l’ambiance qui se dégage du petit groupe de personnages de FFXV est absolument excellente. Pendant une bonne partie de l’aventure on ressent parfaitement l’esprit de camaraderie de nos quatre héros, que ce soit pendant qu’ils campent à la belle étoile ou lors d’une partie de cartes dans un hôtel. Les petites phrases que s’échangent Gladiolus et ses compagnons aident d’ailleurs beaucoup à construire cette ambiance assez unique.
Et quand le jeu prend une tournure beaucoup plus tragique, avec des relations entre chaque membre de l’équipe plus tendues que jamais, on ressent parfaitement ce changement d’ambiance dans les interactions. D’ailleurs une scène assez spéciale, qui se déroule uniquement si vous campez pendant lors d’une mission du scénario, a réussi à me mettre parfaitement mal à l’aise sans qu’un seul mot soit échangé à l’écran. Et des petits détails comme les photos que Prompto prend régulièrement pendant votre voyage arrivent à créer une ambiance assez unique, surtout quand ces photos sont utilisées pour construire une scène très forte dans le jeu.
Final Fantasy XV arrive, selon moi, à créer une véritable équipe soudée et crédible. J’ai toujours eu du mal avec les personnages d’un jeu Final Fantasy et la cohésion de l’équipe mais FFXV arrive à le faire parfaitement en proposant des protagonistes réalistes, crédibles et aux motivations sincères.
Revisiter un terrain connu
Mais Hajime Tabata ne s’est pas contenté de simplement revoir la façon d’écrire les personnages d’un jeu Final Fantasy, il a aussi réfléchi à certaines mécaniques de jeu qu’on pourrait presque qualifier d’institutionnelles et les a repensées, rebâties.
Les premières « victimes » de ces changements ce sont les invocations. Extrêmement limitées puisqu’il n’existe pas de commande dans les menus pour les appeler en plein combat, les invocations de FF XV n’apparaissent que si Noctis est en grande difficulté et surtout elles en imposent véritablement par leur puissance de feu.
L’incapacité pour le joueur à utiliser Ramuh ou encore Shiva de façon libre, et surtout les cinématiques absolument fantastiques qui accompagnent les attaques des Dieux du Lucis donnent un véritable sentiment de puissance aux invocations de FFXV. En fait j’ai eu pour la première fois, en dehors de mon aventure dans Final Fantasy Type-0, l’impression de faire appel à un véritable Dieu, une entité surnaturelle et surtout surpuissante.
C’est donc un changement en profondeur des invocations, qui étaient jusque là des magies plus puissantes que la normale et très facile à appeler en plein combat, sans qu’on ressente la puissance et la terreur qu’elles devraient inspirer.
En plus de modifier radicalement les invocations, Final Fantasy XV revoit aussi complètement la façon d’utiliser la magie dans son univers. Plutôt qu’une simple commande accessible à beaucoup de personnes, la magie dans l’univers de FFXV est limitée à un petit nombre d’humains. Mais surtout elle change radicalement de forme puisqu’il faut maintenant créer ses sorts en utilisant des essences de feu, de glace et d’éclair qu’on peut récolter sur le corps de certains ennemis ou plus simplement dans la nature, près des sanctuaires où peuvent se reposer nos héros.
Les magies sont donc elles aussi limitées par leur nombres d’utilisation mais aussi leur efficacité : même si elles sont capables de faire très mal à vos ennemis, une magie mal placée peut aussi infliger des dégâts à Noctis et ses amis.
Ces changements sont déroutants, surtout pour les amateurs de longue date de la série Final Fantasy, mais finalement FF XV est un jeu plutôt déroutant en lui-même et je trouve ces modifications de gameplay très intéressantes et plutôt intelligentes.
Je voulais aussi parler de la version française de Final Fantasy. Je ne suis pas, en tout cas pas d’habitude, un grand amateur des doublages en français et je choisis toujours de jouer avec les voix originales quand j’ai le choix. Cependant pour Final Fantasy XV j’ai fait le choix de jouer uniquement en français sous les conseils avisés de Mickaël, Romain et Damien.
Si je devais définir ce qu’est un bon doublage, je pense qu’il s’agirait pour moi d’un doublage qui arrive à vous faire oublier qu’à tout moment vous pouvez basculer sur les voix originales du jeu. Et de ce point de vue là Final Fantasy XV réalise un exploit avec une version française absolument parfaite, juste et proposant des acteurs talentueux parfaitement dirigés dans leur interprétation. Exactement comme Kingsglaive, qui était déjà un excellent film et qui se hisse sans souci dans le top de ce que j’ai vu en terme d’interprétation depuis de très longues années. Nyx est un personnage formidable et son doubleur français à réussi à me le faire aimer, et regretter, en moins de deux heures de film.
La conclusion ? Jouez-y !
Il y a de quoi être déçu en voyant le potentiel gâché de Final Fantasy XV, entre les différentes mises à jour qui devront rajouter du contenu, modifier certaines segments du jeu ou encore les différents glitchs ayant révélé du contenu coupé. Cependant ce qu’a réalisé Hajime Tabata est un morceau unique de l’univers Final Fantasy, une balade entre quatre frères qui a réussi à me toucher comme rarement un jeu aura réussi à le faire et ce grâce a ses petits détails, ses dialogues maîtrisés et la construction d’une équipe aussi attachante que réaliste.
D’ailleurs il me parait logique d’évoquer dans la conclusion de ma critique le chapitre final de FFXV, qui a lui seul arrive à racheter absolument tous les défauts, petits ou gros, du jeu en proposant une conclusion fantastique à ce voyage. J’ai rarement vu une fin aussi maîtrisée, puissante et intéressante dans un jeu-vidéo. Je parlais récemment dans un 30 Day Video Game Challenge de la scène la plus émouvante que j’ai vécu dans un jeu-vidéo, et même si je ne compte pas changer d’avis après avoir terminé FFXV, le dernier feu de camp de Noctis, Ignis, Prompto et Gladiolus risque de me hanter pendant encore longtemps tant cette scène était parfaite, à la fois triste et juste.
Dans tous les cas je me réjoui de voir Hajime Tabata gravir les échelons chez Square Enix, c’est un producteur talentueux qui sait développer des aventures et pas juste des jeux, avec une touche personnelle. J’espère que Final Fantasy XV ne sera pas juste un projet long et douloureux pour Square Enix et que ce titre servira, comme Type-0, de base à une nouvelle génération de jeux Final Fantasy, plus intelligent dans la construction et surtout plus mature.
Je voulais aussi remercier à nouveau Square Enix et tout particulièrement Marjorie de nous avoir fait parvenir un exemplaire de Final Fantasy XV.
- J’ai testé la Trust GXT 900 Qudos RGB Gaming Mouse - 26 octobre 2020
- La souris Trust GXT 900 Qudos RGB Gaming Mouse débarque à la maison ! - 13 octobre 2020
- Critique de Nioh 2 [PS4] - 20 avril 2020